L'usage de l'IA n'est pas nouveau chez Adobe, il se développe très fortement depuis une dizaine d'années. "La volumétrie de contenus et de données de bonne qualité et structurées que nous traitons alimentent nos moteurs d'intelligence artificielle pour les traduire en fonctionnalités", explique  Lionel Lemoine, directeur de solutions consulting pour l'Europe de l'Ouest chez Adobe. "Souvent nos clients utilisent des fonctionnalités qui font appel à l'IA sans même qu'ils le sachent", ajoute-t-il. C'est le cas par exemple des traitements d'image possible dans Photoshop qui puisent dans les contenus disponibles sur Adobe Stock (place de marché en ligne pour la commercialisation d'assets numériques de professionnels issu du rachat de Fotolia par Adobe en 2014, ndlr.). La nouveauté en ce mois de mai 2023 est bien évidemment l'intégration de l'IA générative qui touche aussi bien aux fonctionnalités liées aux données, qu'à l'orchestration de campagnes marketing ou plus directement à la création de contenus. Voici ce qui change

Adobe Firefly, l'IA générative d'Adobe basée sur des contenus qu'Adobe a le droit d'utiliser

Firefly, le moteur de création d'images d'Adobe basé sur une IA générative, est pour l'instant disponible sur Photoshop en phase bêta : comme pour les autres outils d'IA générative du marché, l'utilisateur formule à travers un prompt ce qu'il souhaite avoir comme image ou stylisation graphique de textes pour obtenir son résultat. Mais il y a une différence de taille : "Firefly est alimenté par des contenus dont le copyright est très clairement établi : soit nous avons l'autorisation de nous en servir pour entraîner l'IA soit le contenu est libre de droits", précise Lionel Lemoine.

"Firefly est alimenté par des contenus dont le copyright est très clairement établi"

L'outil s'appuie pour cela sur la centaine de millions d'images présentes dans la marketplace d'images d'Adobe : Adobe Stock. "Ce sont des contenus structurés et professionnels, qui en font une base d'entrainement unique sur le marché." A noter que l'entreprise s'appuie sur la Content Authenticity Initiative qu'elle a cofondée pour s'assurer de la traçabilité des images et identifier celles qui ont été créées avec de l'IA tout comme leur origine. Les premières applications qui bénéficieront des fonctionnalités d'Adobe Firefly seront Adobe Express (la plateforme de création de contenus d'Adobe grand public), Adobe Experience Manager (le CMS d'Adobe), Photoshop et Illustrator.

Un CMS boosté à l'IA pour personnaliser les contenus en fonction des audiences exposées 

Adobe n'a pas encore précisé quand une de ses principales annonces deviendra réalité mais le fait est que dans un avenir proche Adobe Experience Manager, son système de gestion de contenus en ligne (CMS), sera doté d'une capacité bien plus fine d'analyse d'impact en fonction des audiences et d'optimisation grâce à l'IA. "Dans le passé, nous étions capables de traquer des tendances, par exemple de savoir que telle image fonctionnait mieux avec tel segment d'audience. Désormais l'IA nous permettra de pousser plus loin l'analyse non plus en fonction des assets mais des caractéristiques de ces derniers, comme la couleur, la texture et le contexte de l'image. On disposera d'une meilleure compréhension de la résonance du contenu en fonction de sa nature sur chaque audience afin d'adapter leur personnalisation", explique Lionel Lemoine.

"D'expérience, entre l'annonce et la mise sur le marché, il faut compter six mois maximum"

Un changement majeur qui viendra répondre au besoin croissant de personnalisation des publishers sur le digital. "Le but de toute entreprise sur le digital aujourd'hui n'est pas de créer un site mais de pousser le message le plus pertinent en fonction du profil qui vient le visiter. Or, l'exigence de personnalisation multiplie les besoins en production de contenus. Mais pour ultrapersonnaliser un message, on ne peut pas multiplier son budget à l'infini pour créer des contenus en fonction", poursuit l'expert. Enorme cerise sur le gâteau, l'outil sera en capacité de réaliser cette analyse mais aussi de produire lui-même les déclinaisons de contenus qui s'adaptent au mieux grâce à l'apport de Firefly. "Nous avons annoncé la possibilité de générer automatiquement depuis notre CMS des variations d'images sur la base de critères comme la couleur, la texture et l'arrière-plan avec Firefly. L'IA reste donc un assistant. Le template d'origine reste le job du professionnel créatif", précise le spécialiste avec prudence. Adobe ne fournit pas de précision sur quand cette fonctionnalité sera disponible au sein d'Adobe Experience Manager. "D'expérience, entre l'annonce et la mise sur le marché, il faut compter six mois maximum", précise Lionel Lemoine.

Un Adobe Express pour les entreprises pour retoucher les images créées par l'IA générative

Adobe a également annoncé la création d'une version dédiée aux entreprises d'Adobe Express, la plateforme de création de contenus d'Adobe jusque-là dédiée au grand public. "Les marketeurs ont de plus en plus besoin de contrôler quelques retouches et modifications de contenus sans quitter l'environnement CMS. Adobe Express pour les entreprises fera le lien entre Firefly et notre CMS. Vous aurez la possibilité, en plus de bénéficier des déclinaisons d'image sur la base du prompt, de modifier les résultats des prompts à partir de votre CMS." La solution, qui sera intégrée à Adobe Experience Manager, n'est pas encore disponible.

Données first party : segmentation, recommandation et attribution boostées par l'IA

Chez Adobe, les annonces d'intégration de l'IA ont concerné également la segmentation des données au sein de leur plateforme de gestion de données clients, Adobe Real Time CDP (qui fait partie de la dizaine de solutions présentes dans Adobe Experience Cloud). Il est désormais possible d'automatiser la segmentation des audiences dynamiquement ainsi que la définition des meilleures audiences ciblées pour chaque offre que le marketeur souhaite pousser. Cette nouvelle version offre également des recommandations sur les points de contact (e-mail, SMS, display, etc.) à privilégier dans chaque cas de figure. Jusque-là, la segmentation n'intégrait pas cette capacité à recommander les meilleurs cibles pour chaque offre et les points de contact les plus pertinents.

"L'intérêt d'une CDP, c'est d'agréger autour d'un profil unique des données comportementales issues de multiples sources anonymes type web analytics ou nominatives type CRM. La perspective de la fin de cookies génère énormément d'interrogations et renforce l'intérêt de la CDP, qui permet au marketeur de mieux se servir des données qu'il possède déjà sans avoir besoin d'aller chercher des datas third party. Par ailleurs, un de nos outils d'analyse des parcours clients, Customer journey analytics (encore une brique d'Adobe Experience Cloud, ndlr.), dispose désormais d'un nouveau modèle d'attribution, l'"unified mix modeling", qui tient compte de l'ensemble des données de la CDP, qu'elles soient nominatives, sous pseudo ou anonymes", explique Lionel Lemoine.

L'IA générative pour peaufiner et ultrapersonnaliser les messages des campagnes marketing

L'IA permettra bientôt de mieux contextualiser les messages destinés aux audiences. Jusque-là, l'outil de personnalisation permettait d'ajuster le message en fonction des personae et des données CRM, selon un schéma préétabli en fonction des différents scénarios des campagnes marketing eux-mêmes ajustés aux groupes cibles. Demain, certains passages du texte du message pourront être alimentés par l'IA pour une plus grande finesse en termes de ton et de mots-clés, davantage ajustés à chaque visiteur.

"Chaque entreprise pourra se servir de ses propres informations pour alimenter et former l'algorithme"

"Nous nous appuierons sur l'IA générative pour à la fois adapter le ton du message et y intégrer des mots-clés. Nous ne souhaitons en revanche pas que tout le texte soit produit par l'IA. L'objectif est de gagner en pertinence et en finesse tout en gardant le contrôle. L'IA est un assistant qui permet de faire de l'ultrapersonnalisation – et d'aller donc beaucoup plus loin que la personnalisation par groupes de personae – et de choisir intelligemment le mieux contenu à pousser en fonction de l'audience", explique Lionel Lemoine, en précisant que le marketeur pourra choisir entre ChatGPT (OpenAI) sur Azure ou Flan T5 de Google. "Par ailleurs, chaque entreprise pourra se servir de ses propres informations pour alimenter et former l'algorithme." Là encore, Adobe ne fournit pas de prévision précise sur la mise sur le marché de cette nouvelle fonctionnalité.

Les outils de définition de parcours clients et d'orchestration de campagnes marketing concernés par ces avancées sont Adobe Campaign (BtoC), Marketo Engage (dédié au BtoB) et Adobe Journey Optimizer (AJO), la version cloud d'Adobe Campaign qui est connectée à la CDP d'Adobe. Dans le cas de Marketo Engage, une autre nouveauté est l'intégration de l'IA générative au chatbot de l'outil, déjà disponible. "Dans ce chat, qui sert à faciliter l'interaction de nos clients avec leurs clients, nous nous limitions à un approche statistique et programmatique pour l'élaboration des réponses. Avec l'IA générative ce chat devient dynamique."

Le live search d'Adobe Commerce alimenté par l'IA

Le moteur de recommandation d'Adobe Commerce, la plateforme d'Adobe Experience Cloud dédiée aux e-commerçants, est lui aussi désormais alimenté par l'IA. "L'apport de l'IA est colossal car elle va s'appuyer sur des profils similaires de comportements de navigation à l'intérieur du site et de requêtes, en plus de ce que l'on sait de l'historique d'achat du visiteur ou de son comportement en tant que prospect, pour formuler des recommandations plus adaptées aux consommateurs au fur et à mesure de leur consultation et recherche", conclut l'expert.


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