D'après Valuates Report, l'utilisation de la réalité augmentée dans le retail devrait atteindre 4,6 milliards de dollars d'ici 2026, soit un taux de croissance annuel de 20% entre 2021 et 2026. Par ailleurs, une étude de Cappasity, société spécialisée dans la visualisation de produits en 3D, indique que 82% des visiteurs d'une page produit activent la vue en 3D et que le taux de conversion des produits incluant la 3D est supérieur de 40% par rapport aux produits n'incluant pas de vue en 3D. Une tendance que la crise sanitaire a certainement accéléré si l'on en croit Adobe. "Actuellement, de nombreux e-commerçants qui sont confrontés à certaines problématiques de croissance réfléchissent à des options pour réduire leurs charges et se tournent vers la 3D", constate Grégoire Pauty, business architect chez Adobe. Par exemple, une technologie 3D comme la photographie virtuelle permet d'ajuster les angles, les couleurs et diverses caractéristiques du modèle 3D en quelques clics. Et ce, sans avoir besoin de créer un modèle physique à chaque modification d'un produit, supprimant ainsi les services d'un photographe.

Photographie virtuelle

Le boom du e-commerce et la concurrence accrue sur le marché (27 000 nouveaux sites sur un an au T2 2021, soit un nouveau site marchand toutes les 20 minutes d'après la Fevad), implique en effet pour les acteurs de la vente en ligne d'optimiser leur contenu en proposant toujours plus de personnalisation tout en maîtrisant les coûts. Le but ? Offrir une expérience client unique, aussi réaliste qu'en boutique, et fidéliser les consommateurs. D'où l'intérêt pour la photographie virtuelle qui permet de se différencier et in fine, de provoquer un achat spontané. "C'est la grande nouveauté cette année, assure Grégoire Pauty. La photographie virtuelle facilite la mise en situation du produit et réduit les coûts de production." 

Autre avantage, la photographie virtuelle et plus largement la 3D facilitent les précommandes avant la phase de production. "C'est une autre manière de vendre en ligne car la 3D permet aux consommateurs d'acheter des produits dont le positionnement a été plus mûri puisque la modélisation 3D permet des modifications du produit à l'infini. Cela peut aussi être un outil pour des lancements de produits afin de susciter l'engouement", souligne le business architect d'Adobe. L'éditeur de logiciels graphiques s'est imposé sur le segment de la texture 3D (qui permet ensuite de réaliser des prototypes virtuels), depuis le rachat de Allegorithmic en 2019, leader mondial de la texture 3D. "Chez Adobe, nous travaillons sur la 3D depuis des années mais cette acquisition nous a permis de réaliser un saut quantique via notre offre Substance 3D, sur un segment d'activité qui est en pleine croissance, notamment en e-commerce", développe Grégoire Pauty.

Le modèle de canapé est disponible dans Substance 3D Assets. Il a été texturé dans Painter à l’aide d’une matière cuir créée via Sampler à partir d’un échantillon réel. Il a ensuite été importé dans Stager pour la mise en scène, l’éclairage et le rendu. © Vladimir Petkovic

Ainsi, l'essor de la 3D est l'occasion pour les acteurs du e-commerce de repenser toute la chaîne de production de leur contenu digital, et de s'affranchir de certains coûts de production. Sans compter que les solutions alternatives propres à l'univers 3D accélèrent la commercialisation des produits. Si des acteurs tels que Zara, H&M, Colombia, ou encore Decathlon utilisent le texturing pour leurs modèles 3D, les chiffres des ventes sur leur e-shop restent secrets. Seule indication, le taux d'engagement qui monte en flèche avec la 3D. "Un site marchand a 10 fois plus de chance d'engager un client quand il y a 10 photos, or, grâce au modèle 3D, les variations d'un produit peuvent être réalisées à l'infini", indique Grégoire Pauty. 

Quelle place pour la 3D en retail ? 

Dans les boutiques aussi, les outils 3D s'invitent peu à peu. La technologie de numérisation 3D développée par Matterport, entreprise américaine de données spatiales qui digitalise les espaces physiques, offre de nombreux usages aux commerçants. Depuis l'application Matterport ou grâce à une caméra Matterport ou un autre modèle compatible (iPhone par exemple), le commerçant peut scanner un espace dont les données sont traitées par l'intelligence artificielle de Matterport (Cortex AI). Matterport les transforme ensuite en réplique numérique et immersive, appelée jumeau digital. "A l'arrivée, on obtient un modèle dans lequel on peut naviguer, à la manière de Google Street", complète James Morris-Manuel, directeur général EMEA de Matterport. Parmi les usages que peuvent permettre les jumeaux numériques pour les commerçants, la mise en œuvre des protocoles sanitaires, jauges et autres distanciation sociale depuis la réouverture des magasins mais aussi une meilleure organisation en matière de destockage . "Le jumeau digital permet de déployer, en complément de l'expérience physique, et au-delà du site e-commerce, une expérience immersive en 3D qui permet aux acheteurs de visiter virtuellement un magasin à l'échelle réelle, d'interagir avec une marque et ses produits, et d'accéder aux aspects plus sensoriels du shopping", détaille James Morris-Manuel. 

Jumeau numérique du magasin Labrador à Paris. © Matterport

Mais la technologie 3D en boutique peut également passer par le smartphone des clients. "L'expérience digitale en boutique peut être l'occasion pour le retailer de travailler un contenu spécifique autour du produit et de le raconter grâce à la réalité augmentée", remarque Rémi Le Druillenec, co-fondateur et directeur général de l'agence de retail expérience Héroïne. Mieux, la 3D allège le rôle de la boutique où tous les produits n'ont plus besoin d'être présentés. "Le client se déplace pour s'approprier la 3D et vivre une expérience découverte différente sans forcément se concentrer sur les produits présents sur place", ajoute Rémi Le Druillenec qui évoque aussi l'usage du QR code dans les magasins physiques pour transmettre des informations plus ciblées. Le client maîtrise ainsi son parcours en magasin, à l'image de la logique e-commerce avec la possibilité de filtrer sa recherche. Par exemple, le concept store de Saint Maclou, lancé en 2018 dans son showroom parisien de Nation, propose une table 3D interactive de 55 pouces qui permet au client de modéliser les 1 200 échantillons proposés dans le magasin simplement en les posant sur la tablette.

Si les outils 3D ne manquent pas pour augmenter le rôle du magasin physique, le marché français n'est pas précurseur en la matière. "La réticence ne vient pas des consommateurs mais des marques qui s'ouvrent petit à petit à ces technologies 3D", note le directeur général de Héroïne. "Les spécialistes 3D ne sont pas des profils abondants sur le marché", justifie Grégoire Pauty chez Adobe. D'où la nécessité d'accompagner e-commerçants et retailers pour s'entourer des bons partenaires et prendre définitivement le virage de la 3D.  


Source link