[Mise à jour du jeudi 10 mars 2022 à 12h37] L'épineux dossier des retraites va-t-il faire son grand retour ? Le candidat Emmanuel Macron va proposer de repousser l'âge légal de départ à la retraite à 65 ans, contre 62 ans aujourd'hui. Une proposition confirmée par le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal, au micro de RTL, ce jeudi matin. "Dans le programme d'Emmanuel Macron, il y aura la proposition d'allonger l'âge de départ à la retraite et de le passer progressivement à 65 ans", a-t-il souligné. Outre un allègement de l'âge légal, le candidat envisage un "minimum de retraite à 1 100 euros" pour toute carrière complète, ainsi que la "suppression des principaux régimes spéciaux", a-t-il ajouté, citant celui de la RATP et des industries électriques et gazières (IEG) et prônant "une réforme de justice".

"Il y aura une discussion avec les syndicats", a-t-il aussi souligné, ajoutant que le président de l'Assemblée nationale, Richard Ferrand, "pour le compte du candidat Emmanuel Macron, présente (ce) projet de réforme à la CFDT aujourd'hui à l'occasion d'une audition". Mercredi, le chef de l'Etat a réuni près de 300 parlementaires à Paris dans le cadre de la campagne présidentielle. Selon un participant, Emmanuel Macron a affirmé qu'il entendait porter "une réforme des retraites ambitieuse pour un modèle social qui tienne". "Mais qui demande aussi un investissement pour la solidarité entre les générations et un chantier pour l'autonomie".

Mais concrètement, comment s'opérerait l'allongement de l'âge légal de départ à la retraite ? Selon Les Echos, un rythme de quatre mois cotisés supplémentaires seraient ajoutés par génération, soit une transition de neuf ans. Ainsi, si le président de la République était réélu, et que la réforme entrait en vigueur en 2023, elle serait pleinement mise en œuvre à compter de 2032. "Cela veut dire que l'âge légal dépassera l'âge moyen du taux plein, a expliqué le négociateur retraite de la CFDT auprès du quotidien économique. Donc l'effet ne se fera pas sentir seulement pour ceux qui ont commencé tôt, mais aussi pour le salarié moyen." Pour ce représentant, pareille réforme constituerait une accélération de la réforme Touraine, qui a porté à 43 annuités la durée de cotisation nécessaire pour atteindre le taux plein, à compter de la génération née en 1973. Emmanuel Macron n'est pas le seul candidat à s'être positionné sur le sujet des retraites. La candidate Les Républicains, Valérie Pécresse, propose également de repousser l'âge légal de départ à la retraite à 65 ans. Eric Zemmour, lui, propose un âge de départ à 64 ans. Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen avancent un âge de départ à 60 ans. Quant à Anne Hidalgo, elle propose de laisser l'âge de départ à 62 ans. 

Pour rappel, le projet initial de réforme, avorté en raison de la crise sanitaire en mars 2020, visait initialement la mise en place d'un système de retraite universel par points, avec l'établissement d'un âge-pivot à 64 ans. Objectif affiché, inciter les Français à travailler plus longtemps, pour faire face à l'enjeu démographique, le nombre de retraités augmentant plus rapidement que le nombre d'actifs. Le déficit du régime des retraites devrait avoisiner les 10 milliards d'euros par an, jusqu'en 2030, selon le Conseil d'orientation des retraites (COR). L'ambition est donc de "préserver les pensions de nos retraités", avait expliqué le chef de l'Etat au mois de décembre dernier.

En quoi consiste la réforme des retraites ? Résumé

Voici en résumé ce que contenait le "texte sur lequel le gouvernement engage sa responsabilité", disponible sur le site Internet de l'Assemblée nationale et validé en première instance début mars 2020 suite à l'utilisation du 49.3 :

  • La fin des 42 régimes spéciaux au profit d'un système universel en répartition qui fonctionnera par points
  • Un calcul des pensions par points, dont la valeur ne pourra pas baisser ni augmenter moins vite que l'inflation, accumulés "tout au long de la carrière professionnelle"
  • La hausse des salaires des enseignants, qui sera matérialisée dans une future loi de programmation
  • A destination, entre autres, des avocats, un abattement de 30% sur l'assiette des cotisations sociales des professions indépendantes et un "dispositif de solidarité" à destination des "petits cabinets"
  •  La généralisation de la visite médicale à 55 ans pour les travailleurs exposés à des facteurs de pénibilité et l'amélioration des modalités d'acquisition de points, dans le cadre du compte professionnel de prévention, pour les travailleurs exposés à plusieurs facteurs de risques professionnels
  • Un "congé de reconversion" pour les personnes soumises à la pénibilité, pouvant aller jusqu'à six mois
  • Le maintien de départ légal à 62 ans, voire moins pour les fonctionnaires exerçant des "fonctions régaliennes" (policiers, douaniers, surveillants pénitentiaires, contrôleurs aériens) pouvant toujours partir en retraite à 57, voire 52 ans
  • Maintien, pour les militaires, du droit de percevoir une pension après 17 ou 27 années de "services effectifs"
  • De nouvelles mesures de baisses de droits dès 2022. L'hypothèse privilégiée est celle d'un âge pivot atteignant 64 ans en 2027, assorti d'un "mécanisme de bonus-malus" de 5% par an, mais il pourra aussi s'agir de l'allongement de la durée de cotisation ou du report de l'âge légal. La conférence sur l'équilibre et le financement des retraites devra remettre d'ici fin avril 2020 ses propositions pour remettre le système de retraite à l'équilibre d'ici 2027
  • L'extension du "compte pénibilité" et de la retraite pour incapacité permanente déjà en vigueur dans le secteur privé, qui permettra à certains de cesser le travail à 60 ans
  • La possibilité, pour les égoutiers recrutés avant le 1er janvier 2022 de partir à la retraite à 52 ans
  • La possibilité, pour les fonctionnaires ayant opté pour leur maintien dans la catégorie B de la fonction publique hospitalière, de continuer à partir à 57 ans
  • L'extension de la retraite progressive aux salariés en forfait-jours, aux régimes spéciaux et aux agriculteurs
  • La modification des règles du cumul emploi-retraite, afin que ceux qui perçoivent une pension à taux plein puissent accumuler des points supplémentaires lorsqu'ils reprennent une activité
  • Une retraite minimum à 85% du Smic en 2025
  • Une majoration en points de 5% par enfant, dont la moitié sera attribuée à la mère au titre de la maternité, l'autre moitié pouvant être partagée entre les deux parents ou attribuée à l'un ou à l'autre
  • Un bonus supplémentaire de 2% pour le troisième enfant, automatiquement réparti à parts égales entre le père et la mère, sauf décision contraire de leur part ; l''attribution de points supplémentaires aux parents isolés
  • Un nouveau calcul des pensions de réversion qui garantira au conjoint survivant, à partir de 55 ans et deux ans de mariage au moins, 70% des points de retraite acquis par le couple (à partir de 2037 pour les personnes ayant intégré le système universel).

Le projet de loi organique, celle devant encadrer la réforme sur le plan financier, deuxième volet de la réforme des retraites, a quant à lui été adopté le jeudi 5 mars 2020. Après un vote, cette fois-ci, par 98 voix contre 1. Comme toute loi organique, elle devait être soumise au Conseil constitutionnel avant promulgation, si le gouvernement avait décidé de maintenir ce texte en l'état, option qui ne correspond pas aux dernières déclarations. Que contenait-elle ? Entre autres :

  • Une règle d'or obligeant le système de retraite à l'équilibre pendant 5 ans. Tous les ans, "les lois de financement de la Sécurité sociale" devront présenter "une trajectoire de la branche retraite à l'équilibre pour les cinq années suivantes"
  • L'application, dès 2022, du système universel de retraite aux parlementaires (députés et sénateurs) nés à partir de 1975
  • La suppression de la sanction disciplinaire de mise à la retraite d'office pour les magistrats.

Système de retraite par points : comment ça marche ? 

Le futur système de retraites envisagé initialement est un système par points. Le système de retraite à points (ou retraite par points) fonctionne de la manière suivante : un actif cotise et accumule chaque année un nombre de points transformé ensuite en pension mensuelle une fois l'âge de la retraite atteint. Avec ce système, chaque personne faisant partie de la population active dispose d'un compte sur lequel les points sont additionnés.

Les points sont par la suite transformés en une somme d'argent que le retraité recevra chaque mois. Le passage de points à une pension se fait via un coefficient de conversion qui peut prendre en compte plusieurs facteurs tels que le nombre d'années cotisées ou encore l'espérance de vie moyenne du pays. Lorsqu'un salarié part à la retraite, sa pension correspond donc au nombre de points acquis durant sa vie active multiplié par la valeur du point en vigueur à la date du départ à la retraite. Le régime général français et les régimes complémentaires (Agirc et Arrco) fonctionnent de cette façon. Le système de retraite français actuel est un régime de retraite par répartition.

Quel âge de départ dans le cadre de la réforme des retraites ?

Dans le cadre de la réforme des retraites initiale portée par Emmanuel Macron, l'âge de départ légal à la retraite devait rester fixé à 62 ans. Toutefois, en vue d'inciter les Français à travailler plus longtemps, une référence à la retraite à "taux plein", l'exécutif voulait mettre en place un âge pivot, fixé à 64 ans, avec un mécanisme de décote ou, à l'inverse, de surcote de la pension de retraite. Le mécanisme de bonus-malus pourrait faire varier la pension de retraite d'environ 5% par an à la baisse ou à la hausse pour chaque année travaillée en moins ou en plus.

A noter que l'âge pivot devait évoluer en fonction de l'espérance de vie de la génération à laquelle l'assuré est attaché. Il aurait donc été amené à être révisé afin de tenir compte des contraintes financières du régime. Avant la crise sanitaire, l'exécutif se disait prêt à retirer cette mesure, qui cristallise les tensions, de son projet de loi sur la réforme des retraites à condition que syndicats et patronat s'entende d'ici fin avril 2020 sur un autre moyen de maintenir l'équilibre financier du nouveau système.

Où en est la réforme des retraites ?

Pour rappel, le candidat Emmanuel Macron appelait de ses vœux cette réforme des retraites lors de sa campagne électorale pour l'élection présidentielle de 2017. Dans sa profession de foi, le futur président de la République évoquait la création "d'un système universel des retraites où un euro cotisé donne les mêmes droits, quel que soit le moment où il a été versé, quel que soit le statut de celui qui a cotisé".  Ce projet de réforme du système de retraite français a été au cœur d'un conflit social qui a débuté le 5 décembre 2019. Parmi les mesures qui cristallisent les tensions figurent l'âge pivot, que l'exécutif prévoyait d'instaurer, le sort des régimes spéciaux (dont ceux de la SNCF et de la RATP), qu'il était question de supprimer, ainsi que la prise en compte de la pénibilité des conditions de travail dans le calcul des pensions.

Voici le calendrier qu'a suivi la réforme des retraites avant l'éclatement de la crise du coronavirus :

  • De mai à décembre 2018 : concertation avec les partenaires sociaux sous l'égide du haut-commissaire aux retraites, Jean-Paul Delevoye. En parallèle, concertation citoyenne sur une plateforme. Cette première étape a commencé officiellement le 31 mai 2018
  • Printemps-été 2019 : présentation officielle des grandes orientations de la réforme et début d'une deuxième session de négociation avec les partenaires sociaux
  • 18 juillet 2019 : remise officiel du rapport Jean-Paul Delevoye au Premier ministre
  • Du 16 septembre 2019 jusqu'à début décembre 2019 : nouveau cycle de discussions avec les partenaires sociaux pour aborder les questions des mécanismes de solidarité (dans le système universel, 1 euro cotisé ouvre les mêmes droits à tous), l'âge et la durée de cotisation, les modalités de l'équilibrage du système des retraites en 2025 et les règles de pilotage à long terme et, enfin, les modalités de transition des 42 régimes existants vers le futur système des retraites. Ces discussions avec les partenaires sociaux sont accompagnées d'un dispositif de consultation et de participation citoyenne, via une plateforme dédiée, ouverte fin septembre 2019. Organisation, également, de réunions publiques autour d'élus locaux ou d'associations dans les territoires au cours du dernier trimestre de l'année 2019
  • 5 décembre 2019 : début du conflit social
  • 24 janvier 2020 : présentation du texte en conseil des ministres
  • A compter du 17 février 2020 : examen du texte en procédure accélérée pendant 15 jours à l'Assemblée nationale
  • Début mars : adoption des projets de loi ordinaire et organique de réforme des retraites. Le premier grâce au 49.3 et le second suite au vote des parlementaires

Selon ce calendrier, il était également prévu ces dernières étapes :

  • Avril 2020 : après son adoption par l'Assemblée nationale, le projet de loi devait être débattu au Sénat, ce qui n'a pas eu lieu en raison de la suspension de toutes les réformes durant le confinement.
  • 2025 : mise en place progressive des mesures de la réforme. A l'heure actuelle, il n'a pas été précisé si ce calendrier sera tenu.

Quand devait s'appliquer la réforme des retraites ?

La réforme des retraites aurait dû être mise en place progressivement à compter de 2025. En raison de la crise sanitaire du coronavirus, le texte a toutefois été suspendu, puis abandonné par le président de la République, devenant ainsi un des sujets majeurs de la campagne présidentielle. 

    Qui était concerné par la réforme des retraites ?

    Les retraités actuels n'étaient pas concernés par la réforme des retraites initialement prévue, tout comme les personnes qui sont "à moins de cinq ans de retraite", malgré une mise en place de la réforme des retraites prévue en 2025. Les retraités qui se trouvent dans cette situation auraient continué à percevoir leur pension de retraite comme c'est le cas actuellement, y compris après l'entrée en vigueur de la réforme. Les premiers retraités concernés auraient été, si le texte de la réforme avait été maintenu, ceux qui sont nés après 1974




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