La RED TEAM : de la science-fiction classée secret défense

Le ministère des armées françaises a un département peu connu et pour le moins original : la RED TEAM, une équipe d’experts en science-fiction, de l’auteur au dessinateur. Le travail de cette équipe, très particulière, consiste à pousser leur imagination au maximum, pour produire des scénarios, qui sont ensuite soumis au cabinet civil et militaire du Ministère des armées.

Le but ? Anticiper au maximum les effets du réchauffement climatique, des mouvements de populations, et des technologies qui n’existent pas encore, sauf dans l’esprit de ces artistes qui osent sculpter le futur, en dehors des sentiers battus et des codes militaires.

La science-fiction : une stratégie vieille de deux siècles

L’existence de la RED TEAM pourrait prêter à sourire. Cependant, il n’en n’est rien, puisqu’elle n’est que l’héritière d’une vieille tradition de la stratégie militaire, celle des « war game ». Un « war game » (ou jeu de guerre en français), est une simulation de conflits armés, réalisés sur des plateaux de jeu.

Cette technique est surtout anglo-saxonne. Par exemple, l’opération « Tempête du Désert », de 1991, a été modélisée et simulée via des jeux de plateau, disponibles dans les magasins spécialisés en jeu de société. Côté français, on s’est quelque peu moqué de ces adultes qui jouaient avec des petits soldats de plomb. C’était un peu vite oublier que Napoléon préparait ses batailles de la même manière !

Mais quel est le lien entre les « war game » et la science-fiction ?

Le lien est un héritage naturel, tout simplement nécessaire, parce qu’à un moment de l’histoire, les jeux de guerre n’étaient plus suffisants pour anticiper les éventuels mouvements stratégiques sur les champs de bataille. En particulier, avec l’arrivée des munitions modernes et des armes (semi) automatiques. Les experts en stratégie évoquent que c’est le colonel Sir Georges Tomkyns Chesney qui aurait ainsi introduit en premier la fiction comme outil de simulation, au travers de l’ouvrage la «  Bataille de Dorking », livre qui simulait une attaque des prussiens sur l’Angleterre.

Quel est le rapport entre ces simulations militaires et votre entreprise ?

Dans ma précédente chronique, je vous proposais de voir la géopolitique comme un outil de management et je posais comme théorie que l’utilisation d’un tel outil marquait le pas, entre un « simple » dirigeant d’entreprise et un « capitaine d’industrie », qui désire assurer la pérennité la plus longue possible à son navire.

Si vous désirez sécuriser au maximum votre entreprise, vous projeter dans les menaces du futur est plus que nécessaire. Avez-vous anticipé une pandémie mondiale qui paralyserait notre économie pendant plus de deux ans ? Sans doute que non. Et sans doute que vous auriez pu tirer un bien meilleur parti de cet évènement si vous vous y étiez préparé.

Or, une partie des scénarios de la RED TEAM est publié par l’Agence de l’innovation de défense, du Ministère des Armées. Il suffit d’en demander l’adresse à votre moteur de recherche préféré. Il est intéressant pour un capitaine d’entreprise et de s’en inspirer, puis de mettre en place des ateliers de science-fiction en interne et de définir des stratégies de crise par rapport à ces fictions.

Croyez-moi, c’est très utile. A titre d’expérience personnelle, deux de nos prédictions se sont réalisées, à savoir la destruction d’un de nos datas center (suite aux inondations en Belgique et en Allemagne de cet été) et une pandémie (dont nous avions anticipé l’existence, mais pas la durée). Osez débrider votre imagination : elle est un allié puissant dans l’anticipation des risques.