Sans détour, Amazon montre son ambition de développer le cœur de son réacteur : Amazon Prime. L’entreprise proposera dès le 1er août sa chaîne Amazon Prime Ligue 1 à 12,99 euros par mois pour ses uniques abonnés Prime.  

Amazon Prime est le bras armé d’Amazon pour conquérir de nouveaux clients et les fidéliser. Fin 2019, Amazon levait le voile auprès de ses investisseurs sur sa poule aux œufs d’or : 100 millions d'abonnés en 2018, avec 50 millions d’abonnés supplémentaires par an, soit aujourd’hui plus de 200 millions dans le monde. 

Si c’est sans doute aussi une façon de redorer son image sur le marché local français, c’est surtout une opportunité pour développer ses revenus récurrents que la firme vient grignoter de nouvelles  parts sur le marché du divertissement. Amazon n’en est d’ailleurs pas à son coup d’essai. Elle a adopté cette même stratégie sur son marché d’origine, les Etats-Unis, en rachetant une partie des droits – pour 10 milliards de dollars – des dix prochaines saisons du football américain. D’ailleurs, Amazon s’était déjà entrainé à préparer le terrain en France, avec un test plutôt bien réussi en proposant les nocturnes de Roland Garros diffusées avec une qualité d’images exceptionnelles, et une pluie de statistiques révélés par des commentateurs de renoms. 

La stratégie Amazon Prime 

A ses débuts, la formule d’abonnement d’Amazon apparaissait comme un non-sens économique : un abonnement proposé à l’année pour 49 euros (en France) quand le coût des avantages associés approchaient les 1 000 euros.  Mais Amazon Prime illustre en fait le super-pouvoir de l’économie en réseau. Ce qui compte, c’est d’établir une connexion durable avec le client. Et investir dans cette relation est payant : les abonnés Prime dépensent environ 2 fois plus que les non abonnés ! La célèbre citation de Jeff Bezos prend, dans ce contexte, tout son sens : “ Quand nous remportons un Golden Globe, cela nous aide à vendre plus de chaussures ”. D’un côté, les avantages de livraison ou prix bas encouragent les achats. De l’autre, la connaissance plus fine des clients acquise avec l’utilisation des divers services offerts et leurs commandes plus nombreuses, permet à Amazon d’améliorer la qualité de ses recommandations en temps réel.

Amazon vient aussi renforcer sa boucle de valeur et ce pour tous ses clients. Plus ils sont nombreux et actifs, plus les vendeurs ont intérêt à rejoindre la place de marché d’Amazon, pour proposer une gamme de produits toujours plus large, ce qui attire de nouveaux clients ou des dépenses additionnelles des existants, et ainsi de suite. Et plus les clients non-membres dépensent leur budget sur Amazon, plus l’abonnement à Prime devient une évidence. Et on comprend mieux l’acquisition des droits du Seigneur des Anneaux pour 250 millions de dollars – et la série à 1 milliard qui s’en suivra – ou encore le rachat de MGM.  

En fin de compte, Amazon Prime n’est qu’un prétexte pour inciter à l’achat, qui peut donc perdre de l’argent ; hors, pour des acteurs comme Netflix, Disney+ ou MyCanal, c’est une forme de concurrence déloyale. Une boucle de valeur vertueuse pour Amazon, certes, mais qui poussée à l’extrême mène à des abus de positions dominantes, et doit être étudiée dans les prochaines régulations européennes (Digital Package). Pour conclure et reprendre les dires de Stéphane Distinguin, fondateur de Fabernovel dans une de ses récentes chroniques : « Alexa, mets le match ».


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