Les annonces autour des lunettes connectées se sont multipliées en septembre. Alors que Microoled a lancé au début du mois une paire affichant par réalité augmentée les informations de santé pour le sport d'endurance et que Facebook a présenté le 10 septembre sa paire avec Ray-Ban permettant de prendre des photos, de courts clips et de passer des appels, Xiaomi a, à son tour, présenté le 16 septembre un prototype de ses Smart Glasses intégrant de la réalité augmentée pour passer un appel, lire des notifications, prendre des photos ou encore suivre un itinéraire. "La reprise de l'activité en septembre est propice aux annonces car les salariés se sont habitués avec le télétravail à interagir différemment et à utiliser des devices pour être dans un monde virtuel", analyse Ouassim Driouchi, senior manager chez le cabinet de conseil BearingPoint.

Cela fait déjà de nombreuses années que les géants du web s'aventurent à commercialiser des lunettes connectées, comme Google avec ses Google Glass ou Snapchat qui proposent des versions de ses Spectacles depuis 2016. Mais ces dernières n'ont jamais vraiment trouvé leur marché. "Elles sont arrivées trop tôt. Les Google Glass notamment intégraient directement de la réalité augmentée, alors qu'ajouter cette technologie devrait être la dernière étape", explique Ouassim Driouchi.

Cette fois ci, les marques ont-elles plus de chances de séduire le grand public ? "Elles ont accumulé l'expérience des montres connectées pour identifier les informations utiles aux consommateurs, la technologie est devenue mature et le prix de la technologie est devenu suffisamment accessible : les Google Glass revenaient à 1 500 euros alors que les lunettes connectées aujourd'hui sont commercialisées entre 200 et 500 euros", souligne Ouassim Driouchi. Autre argument avancé : les lunettes font partie du concept de metaverse promu par Facebook et "il est indispensable pour les acteurs de se positionner le plus tôt possible sur ce sujet pour l'emporter."

Déjà 15 000 paires commercialisées en santé par Tunstall

Plus de 400 000 lunettes connectées ont été commercialisées dans le monde en 2021. © Statista

D'autant que le marché offre des perspectives importantes. Selon les chiffres de la publication AR Insider, présentée dans l'infographie ci-contre de notre partenaire Statista, 3,90 millions de lunettes connectées devraient être commercialisées dans le monde en 2024. "Les lunettes connectées représentent pour des marques comme Apple ou Samsung une extension de la gamme des wearables et donc un relais de croissance", observe Ouassim Driouchi.

Sans oublier que l'intérêt des lunettes connectées dans le monde professionnel permet de démocratiser l'usage. Dans l'industrie, pour développer les opérateurs augmentés, ou en santé les lunettes connectées sont déjà courantes. "Nous avons commercialisé 15 000 paires de lunettes depuis l'an dernier, nous sentons un décollage sur le marché car il s'agit d'un support répandu et le champ des possibles est énorme pour les essais cliniques (en suivant par exemple les effets de somnolence d'un médicament), pour éviter l'endormissement (en vérifiant les battements de paupières) ou encore pour le bien-vieillir en prévenant les chutes", souligne Alain Monteux, président de Tunstall Vitaris, qui a développé une paire avec Optic 2000 et Ellcie Healthy, commercialisée depuis un an.

Toutefois, pour séduire le grand public, les marques doivent remplir plusieurs conditions. La première d'entre elles concerne le design. "Les utilisateurs tiennent à ce que la connectivité soit invisible. Or, pour pouvoir insérer une puce et un écran, la miniaturisation est indispensable", prévient Ouassim Driouchi, rappelant que les premières lunettes connectées s'assimilaient davantage à un casque, un frein à leur adoption. C'est sur cet aspect que mise Microoled, qui met en avant la discrétion et la légèreté de ses lunettes connectées de sport.

Tunstall comptabilise 1 000 abonnés à son service de lunettes connectées. © Tunstall

Deuxième aspect majeur : la sécurisation des données, "le sujet qui effraie le plus les consommateurs", rappelle Ouassim Driouchi. Pour faire face à la défiance du grand public sur ce point, Facebook a ajouté une Led pour signaler tout enregistrement et un interrupteur physique permet de couper les caméras.

Les marques doivent par ailleurs proposer un usage qui s'inscrit dans leur univers. "C'est ce qu'a fait Amazon avec ses lunettes Echo Frames intégrant son assistant vocal. De même, il est logique que les fonctionnalités des lunettes de Facebook concernent la prise de vidéo à relayer sur son réseau social", indique Ouassim Driouchi.

Enfin, la commercialisation doit se faire, selon Ouassim Driouchi, en partenariat avec un opticien. Un avis partagé par Tunstall : "Nous n'avons pas la légitimité pour vendre des lunettes. Pour que les utilisateurs aient confiance dans le produit, ils doivent pouvoir les retrouver chez leur opticien", reconnaît Alain Monteux, dont toutes les lunettes connectées sont disponibles dans tous les magasins Optic 2000. Une raison pour laquelle Facebook s'est associé à EssilorLuxottica, la maison mère de Ray-Ban, pour lancer ses lunettes. "Le potentiel est énorme mais tout comme les montres, ça va prendre encore du temps pour démocratiser pleinement le produit, les Français n'ont pas encore le réflexe de demander une paire connectée", conclut Alain Monteux.


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