Ces dernières années, le réemploi s'est fortement développé dans le monde du textile et est venu complètement révolutionner la mode. Qu’est-ce que le réemploi ? C’est tout simplement donner une seconde vie à un produit en lui redonnant le même usage. Par exemple, acheter en friperie, c’est du réemploi. En 2019, le marché des vêtements d’occasion augmentait 21 fois plus rapidement que celui du neuf. Quels sont les impacts de ce mode de consommation de plus en plus courant ? N’y a-t-il que des bénéfices environnementaux et sociaux à acheter de la seconde main ? Le sujet fait particulièrement débat ces derniers mois.

Etat des lieux 

Revenons d’abord sur quelques chiffres clés des impacts environnementaux de la filière textile. Chaque année, ce sont plus de 100 milliards de vêtements qui sont vendus dans le monde, un chiffre en constante augmentation et qui fait de l’industrie textile l’une des plus polluantes. En effet, sur le seul marché français, l’empreinte carbone serait de 22,9 millions de tonnes, principalement émis dans les pays producteurs. C’est l’équivalent de toutes les émissions de gaz à effet de serre d’un pays comme la Croatie. 

Et les impacts ne sont évidemment pas que sur le changement climatique. Le textile serait responsable de 20% de la pollution de l’eau, utiliserait 70 millions de barils de pétrole chaque année seulement pour le polyester et un quart des pesticides mondiaux pour la culture du coton. 

Impacts sur le changement climatique

Alors évidemment, acheter un vêtement de seconde main au lieu d’un vêtement neuf limite les impacts environnementaux. D’après une étude de l’Ademe de 2017, choisir un jean d’occasion réduirait l’impact sur le changement climatique lié à la production de 80% à 100% par rapport au neuf. Et ce à partir de seulement 2 semaines d’allongement de la vie du produit ! En se référant à la base carbone de l’Ademe pour l’impact d’un jean neuf, c’est au moins 18,5 kgCO2eq qui sont économisés par pièce. 

Réfléchissons maintenant à grande échelle. Le jean est l’un des vêtements préférés des français et il s’en vend plus de 60 millions dans l’Hexagone chaque année. En utilisant les données précédentes, si un jean sur cinq vendu en France était de seconde main, c’est 220 000 tCO2eq qui seraient économisés. Soit l’équivalent des trajets annuels en voiture de plus de 100 000 Français. 

Impacts sur une ressource précieuse : l’eau

Acheter un vêtement de seconde main, c’est également préserver l’eau nécessaire à sa fabrication. En restant toujours sur le jean et en prenant une empreinte en eau de 7000 litres par pièce, si on garde notre scénario précédent d’un jean sur 5 acheté d’occasion, ce serait 84 millions de litres d’eau économisés. De quoi remplir une trentaine de piscines olympiques. 

Impacts sociétaux et effet rebond

Cependant, toutes ces hypothèses partent du principe que l’achat d’occasion se fait au substitut d’un achat neuf. Hors, on remarque un effet rebond de surconsommation sur le marché de la seconde main. On achète plus que nécessaire car les prix sont plus bas, ou on vend des vêtements pour en acheter d’autres neufs. Il est donc important de toujours se poser la question de la nécessité de l’achat, en utilisant la méthode BISOU par exemple. Le produit qui a le moins d’impact est celui qu’on a déjà ! 

Il est également important de se poser la question de l’impact social de la seconde main, et plus particulièrement de l’essor de la vente entre particuliers. Ces dernières années, les structures de l’ESS ( Economie Sociale et Solidaire) telles que Emmaüs ou la Croix Rouge collectaient nos anciens vêtements pour les trier et les revendre dans un cadre de réinsertion sociale. Bien que ces structures aient bénéficié de l’essor de la seconde main en voyant grimper en flèche l’attrait pour les friperies, elles font face à deux problématiques qui viennent fragiliser leur modèle. 

D’une part, on observe une qualité de dons en baisse. Ce que les structures appellent “la crème”, les belles pièces pouvant être facilement vendues, arrivent de moins en moins nombreuses dans leur locaux. En effet, par souci de pouvoir d’achat,  les citoyens vendent eux-même ce qui a encore une valeur marchande et donne le reste. D’autre part, les plateformes de vente entre particuliers se mettent en concurrence directe de ces structures. Les prix pratiqués peuvent y être très bas par rapport aux friperies solidaires qui ont des coûts de fonctionnement à amortir. 

La seconde main reste globalement bénéfique pour la planète et la société. L’important est de rester dans une logique de consommation raisonnée et qui ne met pas au second plan les structures solidaires. L’un des enjeux clés du réemploi, c’est aussi la durabilité des produits.  Donc comme pour acheter du neuf, on mise sur des intemporels et du solide et on fait attention à l’entretien de ses vêtements. Acheter d’occasion ne doit pas être un prétexte à la surconsommation ou aux achats jetables. Il y a donc un vrai intérêt à informer, à accompagner le consommateur pour que les solutions de prolongement de vie des produits soient le plus accessible à tous. 


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