Le métaverse est, depuis quelques mois, sur toutes les lèvres. Comme toutes les innovations technologiques de "rupture", il suscite son lot de réactions extrêmes, de peurs et de fantasmes… Certains, nourris par l’imaginaire de la science-fiction, prophétisent une fusion entre les mondes physique, biologique et numérique, et l’abandon de nos existences dans le monde réel au profit d’une projection addictive dans le virtuel. À l’autre extrême, d’autres affichent le plus grand scepticisme, s’appuyant sur les premiers essais de métaverse, difficilement à la hauteur des anticipations du public – Mark Zuckerberg en a fait les frais récemment, suite au lancement de son monde virtuel, jugé décevant.
La réalité se situe, comme toujours, entre ces deux extrêmes. Non, nous n’allons pas aller vivre une vie nouvelle dans le métaverse ; et oui, le métaverse a un immense potentiel. Il sera bientôt, un outil virtuel offrant d’abord et avant tout d’immenses bénéfices dans le monde réel, et sera en particulier d'une commodité extrême pour le commerce, au profit à la fois des consommateurs et des enseignes.

Il y a 40 ans précisément, Morris Holbrook et Elisabeth Hirschmann, professeurs de l’Université de Columbia et de la New York University, conceptualisaient le Marketing Expérientiel. Ils introduisaient notamment le rôle des émotions et du vécu (« the experience ») dans les mécanismes d’achat. Quatre décennies plus tard, il est tentant de voir dans les nouveaux outils apportés par le métaverse la concrétisation la plus aboutie de cette "consumer experience".
En effet, aujourd’hui, quiconque achète en ligne peut évaluer produits et services grâce aux informations données par le site web le commercialisant et celui du fabricant (c’est ce qu’on appelle le web 1.0), ainsi que par les commentaires vérifiés des clients ou de différents influenceurs (c’est le web 2.0). Le métavers va permettre d’évoluer dans un monde de sens où chacun pourra évaluer par lui-même, au plus près des conditions réelles d’utilisation, un produit ou un service.
On pourra essayer une chaussure virtuelle sur son avatar modélisé avec une précision inédite, essayer un nouveau modèle de véhicule, ou bien faire une visite immersive d’un hôtel pour ses vacances et avoir une image exacte de la surface des chambres, de leur disposition… Tout cela sans sortir de chez soi.
Dans le métaverse, le toucher, le goût ou l’odorat ne seront pas (encore) sollicités, mais il constituera des avancées par rapport à la consommation traditionnelle : la voiture de démonstration ne sera pas immobile comme chez le concessionnaire, elle pourra bouger, accélérer, changer de couleur. On pourra se faire une idée de son espace intérieur ou de sa tenue de route sur une simulation presque plus vraie que nature. Certes, cette expérience virtuelle ne vaudra jamais celle de l’essai « en vrai », mais elle permettra de le préparer, de se faire une première idée, ou de dégrossir un choix où trop d’options se présentent.

Vers une expérience d'achat à distance « parfaite »

Contrairement à ce que l’on entend souvent, le métaverse, ce ne sera donc pas uniquement de l’immatériel, des objets virtuels possédés via les NFT. Bien sûr, quelques-uns achèteront des chaussures virtuelles pour donner du style à leur avatar. Mais cela pourrait rester marginal par rapport aux essayages virtuels de vêtements, réalisés en vue d’un achat dans le monde physique. Peu d’entre nous achèteront des villas virtuelles pour nous installer dans le métaverse, mais nous serons nombreux à faire des visites à distance pour choisir nos lieux de vacances, ou avant toute transaction immobilière.
Bien sûr, il y aura encore des essais ratés et des tâtonnements avant de parvenir à une forme aboutie de cette réalité hybride. Mais le potentiel de cette technologie est immense ; car ce qui s’ouvre ici, c’est une voie vers une expérience d’achat à distance « parfaite ». Celle-ci ne se substituera jamais à l’achat en magasin, qui constitue un vécu irremplaçable. Mais on se rapprochera de la perfection parce qu’on n’aura plus besoin de se déplacer vers un magasin « pour essayer » ; parce qu’on ne sera plus limité par le stock de couleurs et de tailles disponibles dans une boutique donnée ; et parce qu’on pourra revenir, en un clic, autant de fois que nécessaire.

La précision de la modélisation de l’essayage, son caractère immersif, sa facilité, vont permettre des décisions d’achat plus sûres pour le consommateur. Cela se traduira certainement par un nombre de retours de produits en baisse, et donc aussi par une baisse de l’empreinte carbone. En permettant une consommation plus raisonnée, mieux informée, le métavers facilitera aussi la commercialisation de produits d’occasion ou reconditionnés. Et cela aussi, c’est bon pour notre planète.

Alors pas de craintes ou de fantasmes. Entrons avec enthousiasme dans le métaverse !


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