JDN. Le SCRP condamne la proposition de loi visant à réguler l'influence commerciale. Vous ne pensez pas que le secteur nécessite une régulation ?

David Zmirov, vice-président du Syndicat du Conseil en Relations Publics. © Ethel Conseil

David Zmirov. A l'origine, nous sommes totalement favorables au projet de loi. Il fallait absolument encadrer ce secteur. Nous avons nous-même lancé une charte de "la relation influenceurs" il y a trois ans. Nous sommes conscients qu'une partie des influenceurs pose problème. Mais il s'agit d'une toute petite partie. Tous ne font pas la promotion de la chirurgie esthétique ou de jeux d'argent. Nous voulions une loi qui encadre le secteur mais pas une loi qui mélange tout et ne définit rien. C'est dommage.

Pourquoi cette proposition de loi "mélange tout et ne définit rien" ?

Tout simplement parce qu'elle est floue et qu'elle manque de clarté. Son article 1 ne définit pas le métier d'influenceur professionnel mais l'activité d'influence commerciale et englobe potentiellement n'importe quel citoyen. Il n'y aucune distinction entre une personne qui possède un million d'abonnés et les autres personnes. Tout le monde est susceptible de devenir un influenceur : les journalistes, les élus, tous les citoyens qui utilisent les réseaux sociaux. Cette loi est n'est pas assez claire. Et quand une loi est trop floue, c'est au juge judiciaire de l'interpréter. Je ne pense pas que cela soit le but initial.

Dans quelle mesure un citoyen quelconque peut devenir un influenceur ?

Si on s'en tient à la proposition de loi actuelle, toute personne qui, à titre onéreux, émet une critique positive par voie électronique sur un bien, un service, un événement ou une cause exerce l'activité d'influenceur. Et ici, l'expression "à titre onéreux" ne désigne pas nécessairement un avantage financier. C'est-à-dire qu'un journaliste qui fait l'éloge d'un événement culturel auquel il est invité devient un influenceur selon la proposition de loi. Et il devra faire apparaitre la mention publicité dans son article. Même chose pour un citoyen qui fait la promotion d'un préservatif qu'il a reçu de la part d'une ONG en vue d'une campagne de prévention.

Quelles modifications souhaitez-vous apporter à la proposition de loi pour éviter une telle situation ?

En plus de définir la notion d'influenceur professionnel, il faut à tout prix limiter l'expression "à titre onéreux" à l'engagement réciproque. En droit commercial, c'est le béaba. On parle d'engagement réciproque quand il y'a un accord conclu entre deux parties. Si c'est le cas, on est bien dans le cadre de l'influence commerciale : l'influenceur reçoit un avantage, souvent financier, en échange de la promotion d'un bien ou d'un service. Une personne qui fait la promotion d'un échantillon qu'elle a reçu gratuitement ne doit pas être considérée comme un influenceur à partir du moment où aucun contrat ne lui imposait une telle promotion.

Vous estimez que la proposition de loi ne prend pas en compte le libre arbitre des uns et des autres ?

Exactement. Une personne qui, de son propre choix, exprime un avis positif sur quelque chose n'est pas un influenceur et ne doit pas être obligée d'utiliser la mention publicité. Associer la liberté d'expression à la mention publicité c'est complètement grotesque. Les gens ont encore le droit d'avoir leur libre arbitre ! Par ailleurs, en matière de publicité, les règles sont très lourdes, notamment les mentions légales. Pour une personne lambda, cela me semble inapplicable. 


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