En septembre 2020, Asana a fait son entrée au New York Stock Exchange. Dès l'ouverture, son action s'est appréciée 28% au-dessus de son prix de référence, propulsant sa valorisation à 4,2 milliards de dollars. L'opération est l'aboutissement d'une ascension fulgurante. Il faut dire que cette pépite de San Francisco ne sort pas de nulle part. L'un de ses deux initiateurs s'appelle Dustin Moskovitz, milliardaire et cofondateur de Facebook. 

C'est en 2008 qu'il quitte le réseau social pour concevoir l'application de gestion de projet du même nom. Son associé Justin Rosenstein a, lui, débuté sa carrière chez Google où il participe, entre autres, au développement de Gmail Chat, depuis rebaptisé Google Chat. Passé ensuite chez Facebook, il contribue au lancement du bouton Like. C'est là qu'il a rencontré son futur complice.

Dans le sillage de son entrée en bourse et après avoir levé 213 millions de dollars depuis sa création en 2009, la société amorce un changement de dimension stratégique. Le défi ? Transformer ce qui était initialement un outil de gestion de tâches amélioré en une véritable plateforme de gouvernance d'entreprise. Pour répondre à cet enjeu, Asana compte sur une brique clé : un graph. 

Visualiser les liens entre les tâches, les projets

Pour comprendre l'apport de la nouvelle brique, un petit retour en arrière s'impose : à l'instar de Trello ou de Microsoft Planner, la gestion de projet est (et reste) dans l'ADN d'Asana. A l'image de ses concurrents, l'application permet toujours de décomposer un projet en tâches que l'on assigne à une équipe. A ces tâches sont associées un descriptif, des pièces jointes (cahier des charges, captures d'écran…), des commentaires et bien sûr une date butoir. Les participants suivent ensuite l'état d'avancement du chantier au sein d'un espace commun pouvant prendre différentes formes : calendrier partagé, liste des tâches à réaliser avec leur degré de priorité, leur échéance, les personnes responsables, liste de projets en cours, ou encore tableau kanban répartissant les tâches d'un projet donné sous forme de cartes par colonnes en fonction de leur état d'avancement (A faire, En cours, Prêt pour révision…), à l'image de Trello.

"Le Work Graph permet à chaque collaborateur, du junior au membre de direction, d'identifier clairement où son travail s'inscrit dans l'organisation"

"En termes R&D, nous investissons massivement dans notre Work Graph et dans ses fonctionnalités", confirme Simon O'Kane, general manager EMEA chez Asana. "Ce modèle de données est notre plus grand facteur de différenciation." On reconnaît là l'influence de Dustin Moskovitz. Le cofondateur et ses équipes se sont évidemment inspirés du Graph de Facebook qui, rappelons-le, tisse les relations entre les membres du réseau social et les contenus qui y circulent : photos, lieux, entreprises, posts, vidéos… De son côté, Work Graph d'Asana combine tâches, projets et portfolios. En amont, les liens se tissent d'abord au sein des projets pour gérer les dépendances pouvant exister entre les tâches. Une toile qui s'affiche au sein d'une timeline dynamique qui s'inspire du diagramme de Gantt. L'avantage ? Pouvoir visualiser immédiatement les chevauchements entre deux tâches, mais aussi mieux maîtriser l'ajout de tâches non-programmées. De quoi bénéficier d'un tableau de bord adapté au management d'un projet complexe.

La timeline d’Asana permet de tisser les liens entre les tâches pour visualiser les chevauchements et mieux maitriser l'ajout de tâches non-programmées. © JDN / Capture

Pour compléter l'édifice, Asana a lancé ce qu'il appelle les Objectifs. Une fonctionnalité taillée pour gérer à la fois les objectifs organisationnels, d'équipes et individuels. "Leur intégration au Work Graph permet à chaque acteur de l'entreprise, du salarié junior jusqu'au membre de la direction, d'identifier clairement, via un tableau de bord de statuts, où son travail s'inscrit dans l'organisation, et quels sont les objectifs globaux auxquels il contribue", explique Simon O'Kane. "Aujourd'hui, le manque de clarté sur les rôles de chacun, leurs responsabilités et la raison d'être des livrables, associé au nombre toujours croissant de messages à traiter, de réunions et de outils de travail à utiliser, handicape plus que jamais les équipes. C'est à cette problématique, qui est d'ailleurs encore plus importante en contexte de télétravail, que nous souhaitons répondre via ce système de navigation graphique." Simon O'Kane insiste : "Clarifier les rôles et objectifs contribue à dynamiser la motivation des employés."

Un tableau de bord de pilotage

Finalement, le tableau de bord d'Asana est un outil de gouvernance. En bout de course, il permet en effet aux différents échelons de direction de suivre l'état d'avancement des projets et leur alignement sur les objectifs stratégiques de l'entreprise. "En navigant, ils peuvent passer des KPI de l'entreprise au statut d'un projet particulier, identifier les équipes en surcharges ou en sous-charges, et ce département par département, avec des indicateurs de couleurs verte ou rouge si les objectifs opérationnels définis sont atteints ou pas", ajoute Simon O'Kane. En coulisse, le machine learning intervient pour générer le tableau de bord et hiérarchiser les priorités.  

Autre enjeu d'Asana : accroître le nombre d'applications intégrées à sa plateforme. Pour l'heure, la société en compte plus de 200. Parmi les plus populaires, on relève Zoom, Microsoft Teams, Slack, Salesforce, Tableau, Zapier. Mais aussi les messageries Gmail et Outlook. Ou encore, dans un autre domaine, Miro et son tableau blanc digital. En ligne de mire, Asana compte par ce biais fédérer tous les contenus utiles à la gestion de tâches et de projets. En parallèle, l'éditeur a développé un environnement de workflow automation (Workflow Builder) conçu pour créer et exécuter des processus de demande business ou d'approbation, ou encore pour automatiser l'ajustement des dépendances au sein d'un projet en cas de dépassements de délais, par exemple. Pour faciliter sa prise en main, Asana a ouvert une Workflow Store de quelques 120 modèles de workflows pré paramétrés. 

Bientôt l'ouverture d'un bureau à Paris ?

A ce jour, Asana revendique 89 000 clients payants (dont les français Air France KLM, Danone, Saint-Gobain ou encore Schneider Electric), et un total de 1,3 million d'utilisateurs. L'éditeur propose une offre gratuite d'entrée de gamme, qui autorise un nombre d'équipes illimité mais un volume de tâches plafonné à 1000 pour chacune d'elles. Une formule dont Asana ne communique par le nombre d'utilisateurs. Pour bénéficier des timelines ou des tableaux de bord de suivi, il faudra passer aux versions payantes. "Une part importante des cas d'usage d'Asana sont centrés sur le marketing : le test et le lancement de produits, la planification et le suivi de campagnes, la gestion des équipes de vente, la gestion opérationnelle, l'onboarding de nouveaux collaborateurs", égraine Simon O'Kane. "Asana est utilisé aussi bien en entreprise que dans l'administration ou dans l'éducation. Certaines organisations peuvent compter des centaines d'équipes."

En Europe, Asana a ouvert des bureaux à Dublin, Londres et Munich, mais pas à Paris. La France pourrait néanmoins figurer parmi les prochains pays où l'entreprise implentera un bureau. A l'heure où nous écrivons ces lignes, son site web affiche deux propositions d'emplois qui seront basés à Paris. L'une concerne un marketing manager pour la France, l'autre un enterprise account manager.


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